Le plus sulfureux des explorateurs européens fut sans nul doute Richard Francis Burton. Polyglotte, aventurier, ethnologue et écrivain, il connut bien des déboires au cours de ses diverses expéditions. Et, s’il découvrit le lac Tanganiyka en 1858, il ne put jamais atteindre les sources du Nil, le saint Graal de tous les explorateurs de cette époque.
Richard Francis Burton nait le 19 mars 1821 dans le Devon, en Angleterre. D’une famille aisée, il fait très tôt de nombreux voyages en France et en Italie, voyages au cours desquels il se révèle être particulièrement doué pour les langues en apprenant le français, l’italien, le latin et, accessoirement, différents dialectes tel que le napolitain ! Admis au Trinity College d’Oxford à l’automne 1840, il n’y restera que deux ans pour cause d’indiscipline notoire. Il n’a alors d’autres choix que de s’engager dans l’armée.
Par goût des voyages et de l’aventure, il choisit la compagnie anglaise des Indes orientales pour aller combattre en Afghanistan. Il arrive après la bataille et se retrouve donc en Inde, affecté au 18e régiment d’infanterie indigène de Bombay, basé à Gujarat sous le commandement du général Charles James Napier. A défaut de combat, Burton se met aux langues et apprend l’hindoustani, le gujarâtî, le marâthî, le persan et l’arabe. Cet intérêt pour les langues mais aussi pour les cultures locales font que ses camarades de chambrée l’accusent de « tourner indigène » et d’être un « nègre blanc ».
Si on ajoute à cela le fait qu’il élevait plusieurs singes dans l’espoir d’apprendre leur langage, vous aurez compris que le sieur Burton passait pour un parfait original. Histoire de le détourner de ses dangereux penchants, le général Napier l’envoie cartographier la lointaine contrée du Sind, au nord de l’Inde. Pas de soucis, en quelques semaines, Richard Burton apprend à se servir des instruments de mesure jugés pourtant inaccessibles au commun des mortels, une expérience qui lui sera fort utile lors de ses futures explorations africaines. Mis au repos, il rentre en Europe et rencontre sa future femme, Isabel Arundell, à Boulogne-sur-mer.
Malgré cette idylle, Burton ne tient pas en place et obtient en 1850, le soutien de la Royal Geographical Society de Londres pour monter une exploration en péninsule arabique et surtout réaliser le Hajj, le pèlerinage à la Mecque pourtant strictement réservé aux Musulmans. Grâce à sa connaissance de l’arabe et son goût pour les déguisements, il réalise cet exploit en 1853 qui le rendra enfin célèbre. En mars 1854, il se rend à Aden (Yémen) afin de préparer une nouvelle expédition en Somalie.
C’est là qu’il rencontre le capitaine John Hanning Speke, futur compagnon d’exploration. Il part néanmoins seul en Somalie et est le premier européen à entrer dans la cité d’Harrar (Erythrée) malgré une ancienne prophétie qui annonçait que la cité commencerait à décliner le jour où un chrétien parviendrait à l’intérieur. Au cours de cette expédition, il entend parler de grands lacs situés plus loin sur le continent. De retour à Aden, il décide de partir à leur recherche en compagnie de John Speke et de William Stroyan. A peine arrive en terre Somalie, le groupe est attaqué, Stroyan est tué, Speke blessé onze fois et Burton a le visage transpercé d’une lance dont la pointe pénètre par une joue et ressort par l’autre.
Suite à cet échec, la Royal Geographical Society accepte pourtant en 1856 de financer une nouvelle expédition au départ de Zanzibar pour aller découvrir cette « mer intérieure » décrite par des marchands arabes et des esclaves. Speke l’accompagne de nouveau et, le 27 juin 1857, ils quittent la côte orientale de l’Afrique. Là aussi, la chance n’est pas avec eux. Speke devient aveugle durant une partie du voyage et Burton, incapable de marcher, doit être porté une bonne partie du chemin. Malgré cela, l’expédition parvient au lac Tanganyika en février 1858. Lors du voyage de retour, Burton tombe à nouveau malade et Speke décide de partir seul vers le nord, espérant secrètement découvrir les sources du Nil.
Le 3 août 1858, il arrive sur les rives du lac Ukéréoué, qu’il baptise lac Victoria, du prénom de la reine d’Angleterre. Il pense avoir trouvé les sources du Nil, ce qui ne sera confirmé que bien des années plus tard. Dans l’immédiat, c’est surtout une source d’ennuis qui lui vaudra une brouille définitive avec Burton, dont ce sera la dernière grande expédition.
En janvier 1861, Richard Burton épouse enfin Isabel Arundell et entame une belle carrière dans la diplomatie comme consul. Lors de son premier poste en Guinée équatoriale, il en put résister au plaisir d’être le premier européen à gravir le mont Cameroun. Il sera ensuite consul au Brésil, en Syrie, puis en Italie où il décède le 20 octobre 1890. Au cours de ces années, il rédige de nombreux ouvrages sur ses aventures mais aussi traduit certains ouvrages jugés fort licencieux pour l’époque tels que le Kâmasûtra (1883), Le livre des Mille Nuits et une Nuit (1885), Le Jardin parfumé du Cheikh Nefzaoui (1886)…